lundi 29 juin 2015

En soutenant la Syrie, Moscou se protège contre les djihadosionistes

L’ensemble des organisations islamo-terroristes du Caucase - Tchétchénie, Daguestan, Ingouchie et Kabardino-Balkarie - vient de prêter allégeance au faux Calife Ibrahim – Abou Bakr al-Baghdadi, de son vrai nom Shimon Elliot, agent israélien du Mossad – qui a nommé pour le représenter le cheikh Abou Mohammad al-Qadari, wali du Caucase.
Le journal libanais "L’Orient-Le Jour" a interviewé Nikolay Kozhanov, chercheur associé en politique étrangère et en sécurité à l’Institut du Moyen-Orient du Centre Carnegie de Moscou. 

Caroline Hayek : Que sait-on de ces jihadistes venus de l'Est ?
Nikolay Kozhanov : Moscou ne dissimule pas le fait que, actuellement, ses préoccupations principales dans la situation de crise au Moyen-Orient sont directement liées à ces ressortissants russophones qui ont rejoint les insurgés en Syrie et en Irak. Pendant les deux dernières années, le nombre de ces personnes a augmenté au fur et à mesure. Si, début 2013, il y avait environ 200 ou 250 combattants russophones en Syrie, en 2015 ce chiffre a drastiquement augmenté. En somme, en 2015, ils seraient environ 1 500 ou 2 000 ressortissants russophones du Caucase du Nord, de Russie, de la communauté tchétchène de Géorgie, de Turquie et de l'UE ayant rejoint des groupes islamistes divers (comme l'organisation État islamique, le Front al-Nosra, Ahrar el-Cham et d'autres) en Irak et en Syrie.
Une autre préoccupation de Moscou est liée cette fois au nombre croissant de combattants étrangers du sud du Caucase et d'Asie centrale postsoviétique qui s'engagent volontairement auprès des jihadistes en Syrie et en Irak. En 2015, il y aurait jusqu'à 500 Ouzbeks, 360 Turkmènes, 100 Kirghizes et 190 Tadjiks en Syrie. Selon le gouvernement, des Kazakhs combattraient également aux côtés des insurgés en Syrie.
CAUCASE russe
Caroline Hayek : Qu'est-ce qui pousse ces étrangers à venir combattre sur le front syrien ou irakien ?
Nikolay Kozhanov : Il y a plusieurs raisons qui poussent des combattants russophones à partir en Syrie et en Irak. Jusqu'à un certain degré, la situation est semblable à celle des pays européens, dont certains ressortissants ont essayé de rejoindre l'EI et d'autres groupes radicaux pour fuir les problèmes d'ordre socioéconomique, politique ou personnel. Ainsi, le conflit civil en Syrie a créé des occasions multiples pour l'accomplissement social permettant à de simples citoyens sans perspectives de devenir « quelqu'un », en devenant membres de haut rang dans un mouvement jihadiste. Quelques combattants rejoignent aussi la lutte en raison de leurs croyances « romantiques » quant à une possibilité de changer le monde, en protégeant les opprimés et en créant une société nouvelle.
Caroline Hayek : Représentent-ils une menace sérieuse pour Moscou ?
Nikolay Kozhanov : Des combattants russes sont bien représentés, tant aux côtés d'al-Nosra (branche syrienne d'el-Qaïda) qu'aux côtés de son rival, l'EI. Ils se sont avérés être très efficaces sur les champs de bataille et ont même formé leurs propres unités. Cependant, les experts russes sont unanimes dans leur croyance que ces russophones ne voient pas la cause de l'EI ou d'al-Nosra comme la leur. Pour eux, cette lutte est juste une étape préparatoire avant leur retour en Russie où ils pourront déclencher leur propre bataille. En 2013, sur certains bâtiments ravagés en zone de guerre, en Syrie, il était gravé « Mort à la Russie » ou « Aujourd'hui la Syrie, demain la Russie ».
En 2014, Abou Omar al-Chichani (le jihadiste géorgien, chef militaire de l'EI) avait déjà menacé de libérer le Caucase. Prétendument, la trace syrienne a été trouvée par les autorités russes lors de leur enquête sur l'attaque terroriste à Grozny en décembre 2014.
Caroline Hayek : Les combattants russophones sont-ils unis ?
Nikolay Kozhanov : Dans un sens, la Syrie et l'Irak sont devenus les terrains d'un regroupement entre les différentes factions extrémistes russophones. Auparavant dispersés et séparés, ils sont progressivement apparus comme un front uni. De plus, ils ont établi des liens avec des organisations terroristes internationales et font désormais ainsi partie intégrante du réseau extrémiste mondial. Il semblerait que ce processus est en train de prendre deux directions. D'une part, les jihadistes russophones créent, voire dans certains cas restaurent, des liens avec des organisations islamistes internationales ainsi qu'avec leurs sponsors, comme le Qatar. D'autre part, ils profitent de cette situation pour établir un front uni en tissant un réseau de nationalités différentes issues de l'ex Union soviétique. Le fait que, selon certains observateurs des droits de l'homme, tous les combattants russophones soient souvent appelés « combattants tchétchènes », sans prendre en compte les différentes nationalités, car ce sont ces derniers qui prédominent, sert en quelque sorte de symbole pour cette nouvelle émergence jihadiste internationale.
Caroline Hayek : Le président tchétchène Ramzan Kadyrov, qui a appelé dans le passé à l'élimination des musulmans radicaux, sert-il d'une certaine manière de rempart contre l'expansion de l'EI ?
Nikolay Kozhanov : Les experts russes aussi bien que les membres du gouvernement n'ont pas de doutes sur le fait que, une fois ces radicaux de retour en Russie ou dans d'autres pays de l'ex-URSS, leurs connexions renforcées, ajoutées à leur expérience sur le terrain, seront utilisées contre les autorités centrales. Ce sera à ce moment que l'expérience des forces de sécurité russes entrées en Tchétchénie dans les années 1990 – 2000 pourra être extrêmement utile. Cependant, je ne dirais pas que Ramzan Kadirov va être le principal rempart russe contre les jihadosionistes. La responsabilité de se battre contre ces terroristes revient au gouvernement russe dans son ensemble et aux forces de sécurité.

Poutine réitère son soutien à la Syrie



Assad et Poutine
 « Notre politique de soutien à la Syrie, aux autorités syriennes et au peuple syrien, reste inchangée. » a dit le président russe, Vladimir Poutine, à Moscou, lors de sa rencontre avec le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid Muallem. « Nous voyons comment la situation en Syrie, en raison de l’agression du terrorisme mondial se développe, parmi les nombreuses difficultés sur le terrain. Nous sommes sûrs, in fine, que, le peuple syrien gagnera « . 
La Russie a réaffirmé que Bachar al-Assad est le président légitime de la Syrie et du peuple syrien souverain, libre de choisir son propre gouvernement et ses propres dirigeants sans intervention extérieure. Ce qui coupe les herbes sous les pieds de ceux qui assènent sans discontinuer le mantra: « Assad doit partir ». Qui sont-ils ? Et ceux qui disaient urbi et orbi que la Russie a lâché al-Assad, ils n’ont plus que leurs yeux pour pleurer et n’ont visiblement rien compris. C’est ce qui différencie les cuistres des personnes averties et intelligentes. Les pro-Daesh en costume cravate n’ont qu’à aller se rhabiller !
Recevant, en cette fin juin 2015, à Moscou le vice-président du Conseil des Ministres, ministre des AE et des Expatriés, Walid Mouallem, Poutine a fait savoir que les contacts de la Russie avec tous les pays voisins de la Syrie, avec laquelle on a des relations étroites, révèlent qu’ils sont disposés à contribuer à la lutte anti-Daech.
Et Poutine d’ajouter : “Nous appelons nos amis en Syrie à déployer tout effort pour lancer un dialogue étroit avec les pays voisins souhaitant lutter contre le terrorisme”.
Poutine a appelé à renoncer aux discordes avec les pays voisins et à conjuguer les efforts pour lutter contre le terrorisme.
Si la direction syrienne trouve une efficacité et un intérêt dans la création d’une telle coalition en unifiant les efforts pour lutter contre le terrorisme, nous déploierons tout effort à cet égard et nous profitons de nos relations solides avec tous les pays de la région pour créer cette coalition”, a souligné Poutine.
De son côté, Mouallem a indiqué que l’alliance avec les pays voisins de la Syrie pour la lutte anti-terroriste a besoin de grands miracles, “vu que ces pays sont la raison du problème qu’affronte la Syrie et soutiennent le terrorisme”, a-t-il précisé.
Il a, en outre, souligné la disposition de la Syrie à coopérer dans la lutte anti-terroriste même avec ces pays et par le biais des efforts russes.

Lavrov à Mouallem : La Russie continue à octroyer tous les potentiels au peuple syrien pour qu’il puisse mettre fin au terrorisme

Par ailleurs, le ministre russe des AE, Sergueï Lavrov, avait rencontré Mouallem et lui avait affirmé que son pays continue à octroyer tous les potentiels au peuple syrien pour qu’il puisse mettre fin au terrorisme, exprimant la solidarité de Moscou avec la lutte du peuple syrien contre les réseaux terroristes.

Lavrov a affirmé que tous les pays, y inclus les Etats-Unis, sont d’accord que le règlement de la crise en Syrie est politique.
«Il ne faut pas lancer des prétextes pour perdurer le processus politique, alors que le danger terroriste menace aujourd’hui tout le Moyen-Orient», a fait savoir Lavrov qui a appelé toutes les parties syriennes à mettre en application les résultats des rencontres consultatives de Moscou sur le règlement politique en Syrie.
Pour sa part, Mouallem  fait valoir que la situation sur le terrain au sud de Syrie et dans le gouvernorat de Hassaké est rassurante de par le soutien du peuple syrien à son armée.
Il a aussi critiqué la politique de double standard, adoptée par les États-Unis envers la Syrie.
Dans une conférence de presse avec son homologue russe, Mouallem: “Le président Poutine m’a promis de soutenir la Syrie aux niveaux politique, économique et militaire »
Mouallem a indiqué que la coalition regroupant la Turquie, l’Arabie Saoudite, le Qatar et les Etats-Unis pour la lutte contre le terrorisme a besoin d’un grand miracle. « Comment ces pays qui ont conspiré contre la Syrie, encouragé et financé le terrorisme et contribué à l’effusion de sang du peuple syrien pourraient-ils se transformer en une alliance pour la lutte contre le terrorisme ? », s’est-il interrogé, tout en exprimant l’espoir que cela se réaliserait.
Hannibal GENSERIC